Le chemin inverse





Je vous présente un copain d'ablutions. Je pense que c'est là, derrière lui, le lieu de nos ablutions. Comme partout, c'est un lieu froid.
Mon copain possède une caractéristique que l'on ne voit pas très bien sur la photo : il est bègue. Bègue à un point inimaginable : toutes les syllabes sont répétées une douzaine de fois !
Et il est bègue en persan, version tadjique.
C'est assez pratique pour moi, je perçois là des nuances, inaudibles chez mes autres interlocuteurs. Il suffit que je reconstitue les mots sans oublier la première syllabe. Alors, non seulement je comprends tout, mais c'est moins fatigant car lui il reste longtemps sur le même sujet. Les autres ont tendance à me demander d'où je viens, et tout de suite après où je vais. Lui, involontairement, me laisse le temps de réfléchir. J'ai la réponse avant qu'il ait fini de poser la question. En plus, il aime bien parler avec moi, car je ne lui souffle pas trop vite la syllabe suivante : ça le change. Parfois, je souffle un peu quand même. Je sais qu'il a un gamin de 10 mois, que sa femme est de Bopassor, et lui de Bartchidiv. Je sais encore qu'il distribue sur le chemin un très sec, très dur et très bon petit fromage. Il est prêt à m'en échanger un contre mes sandales, car ses chaussures lui blessent les orteils au point qu'il porte des sortes de bottes souples, fourrées en synthétique, à la place des chaussettes.
Il possède aussi une caractéristique qui se voit sur la photo et se voit de loin : il est vêtu de rouge. Et il a été très coopératif quand je lui ai demandé de monter par le sentier que j'ai descendu hier, de façon à le photographier tout du long pour vous donner l'échelle. Tout ça parce que je savais que mes lecteurs prendraient des airs sceptiques devant mes prouesses sportives, et que je devais illustrer mes performances : alors regardez bien les photos et suivez mon copain bègue dans son ascension.
J'ai suivi le chemin inverse, et je précise que c'est plus risqué et spectaculaire de descendre que de monter sur un tel sentier de chèvres avec 16 kg sur le dos.  De plus, vous vous rappelez que je me suis payé l'ascension sur l'autre versant. Vous pouvez agrandir les images pour le voir et même m'offrir un nouvel appareil photo plus performant...
















Alors, vous êtes un peu fatigués, non ?

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