18 août : Non, David Bowie n'est pas russe

Au réveil, un labyrinthe de buissons et de tourbière nous cache le gué. Sur la rive opposée deux fillettes nous font des gestes explicites, et nous guident ainsi jusqu’à un passage aisé, puis nous invitent à les suivre vers leur maison, où leur mère nous offre, sur un carré de toile cirée, thé et tartines beurrées. Ce beurre blanc et tendre est très doux, et nous le récoltons directement dans une tasse avec un quignon de pain moelleux. 

 
Oui, c'est bien leur maison, prolongée par l'enclos des moutons

La pièce unique est cernée aux trois quarts par des bat-flancs couverts de tapis, et la « cuisine » occupe le reste avec un poêle et un tonneau à baratter. Tout est à sa place, les matelas et couvertures empilés dans un coin, la vaisselle et les ustensiles dans un autre, un miroir pour la toilette incliné sur un mur, et l’eau dans le lac 25 mètres plus bas. 

 
   
Et pourtant l’ambiance est surréaliste dans cette maison isolée loin de tout, car nous y sommes agressés par notre propre civilisation : s’y déverse à flots les vibrations stéréotypées du disco russe le plus primaire !
Nous en faisons abstraction, devant les quatre fillettes aux anges qui sont  tout sourire : la petite dernière est teinte au henné, la troisième a le crâne rasé, et les deux aînées portent un foulard noué sur la nuque.


Après l’avoir longé, nous quittons le lac par un raidillon interminable qui nous coupe le souffle. Chaque montée est asphyxiante, chaque col balayé par un vent debout, et les descentes mettent les chevilles à rude épreuve.


Pour suivre la carte qui nous rassure, nous devons franchir la rivière Gunt, impétueuse, large et profonde.




Deux câbles métalliques, reliquats de passerelle, sont le seul moyen à notre disposition. Je tente le coup, suspendu la tête au dessus des flots furibonds, et comprends que j’aurai bien du mal à tracter mon sac sur 25 mètres, à ma suite et assez vite, quand mes bras exigent un effort court… Eva ne va pas plus loin, non plus. 


Contraints et forcés, nous resterons sur la rive droite. Mais alors, c’est l’affluent qu’il faut franchir, et notre première tentative est un fiasco. Deux trekkeurs israéliens, rencontrés là, ont opté pour un arbuste incliné en toboggan qu’ils emprunteront demain, et squattent une bergerie pour la nuit. Nous plantons nos tentes dans la prairie où broutent trois ânes, et les rejoignons pour le dîner.


Nati et Aviad sont chargés comme des mulets, alourdis par les aliments cacher qu’ils ne trouvent pas sur place, et Nati n’a cependant pas hésité à traverser le Népal, la Chine, le Kazakhstan, le Kirghizstan, le Tadjikistan et bientôt l’Ouzbékistan. Je suis content qu'ils puissent se promener dans ces pays musulmans d'Asie Centrale avec la kippa sur la tête. Celle de Nati me parait assez symbolique, en jean effrangé. Avec la kippa apparemment tout est possible et significatif.  


A aller et venir devant la rivière Gunt (comme des fauves en cage ?), nous n'aurons avancé que de 12,5 kilomètres...


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