15 septembre : Survivre à Dochanbé





Je continue ma découverte de la ville. Hélas, sans un sou, je ne peux entrer au Musée des Antiquités admirer le rare portrait sur ivoire d’Alexandre le Grand, ni le grand Bouddha couché d’époque Kouchan.
Je me contente de la Maison des Peintres en pleins travaux, où quelques esquisses de bonne facture valent… 400 dollars.

 


Un premier policier m’interpelle et me suggère de venir prendre un verre avec lui. Suspicieux, je prétends que je n’ai pas soif, et ne ralentis pas mon pas. Vous rappelez-vous le policier russe qui nous avait racketté à la sortie de Xorog ? Il a eu le mérite de m’apprendre la méfiance.
Plus tard, un second policier exige et saisit mon passeport, avant de me demander de le suivre au Commissariat. Je réalise vite qu’il veut m’entraîner à l’écart de tout témoin quand il suggère de nous asseoir sur un banc isolé. Je reste debout mais je dois récupérer le passeport, et je garde un ton badin. J’apprends qu’il est un «grand collectionneur» de… billets de banque ! Et sa si belle collection est dévalorisée par l’absence de valeurs en francs.
Ah ! Quel dommage, les francs n’ont plus cours, mon bon Monsieur, la monnaie française est maintenant l’Euro.
Qu’à cela ne tienne, pour sa collection, il veut bien tous les euros que j’aurais le bon goût de donner.
Ah ! Quel dommage, j’ai bazardé hier tous mes euros chez Air Baltic. A un jour près… (je me dis que c’est peu crédible, un touriste sans le sou : peu crédible et probablement même répréhensible !)
Et je profite de sa perplexité pour saisir le précieux passeport.
Du coup il s’énerve et tapote sa poche ostensiblement.
Qu’est-ce à dire ? Je suis obtus et ne comprends pas l’allusion… Il lui faut simuler, dégainer son pistolet fictif, et faire « pan ! pan ! » dans ma direction.
Ah ! Quel dommage, j'ai la parade : je tapote mon appareil photo, et je simule à mon tour, «clic ! clic !» dans sa direction. Agissons de concert : Tirez ! Souriez ! Vous êtes flashé !
Il me semble qu’il est décontenancé, et moi un peu prétentieux : «Y’en a marre», en français dans le texte, et je tourne les talons sans me retourner. Il ne me suit pas.
Dorénavant, je changerai de trottoir à la vue du moindre képi. C’est un comble ! Mais voilà, la corruption des policiers est de notoriété publique, et semble admise par la population tant leurs salaires sont misérables.

Bazar Chah Mansour :  le pain toujours sur des landaus

Le mouton gras ! Au fond, regardez bien, ce sont les têtes !



 Les épices
 
Les choux-fleurs : "Prince de Bretagne", bien sûr !



et les barbes respectables


Dans le bazar Chah Mansour, je ne risque rien, il y a trop de monde. En demandant la permission de photographier les marchandes, je comprends vite que je peux être nourri à l’œil, c’est le cas de le dire. Non seulement, je me heurte très rarement à un refus, mais je suis même récompensé par un  dédommagement pour ma peine ! Ainsi, ce soir, je rentre à la maison avec une grosse dose de fromage blanc qui nourrirait toute une famille. Et regardez comme il est appétissant dans ses bassines. Appétissant, oui, et je peux le dire d’expérience : nourrissant.







Je vais écrire un petit manuel de survie à Dochanbé,


 quand le nerf de la guerre fait défaut.

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